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AOLIS
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Assis sur la terrasse extérieure, j'observais le jour décliner lentement. Le ciel se parant ainsi de sa robe aux couleurs chatoyantes de fin de journée, tandis que quelques étoiles commençaient à apparaître. Une légère brise soufflait, faisant danser les feuilles des quelques arbres se trouvant dans le jardin et onduler les massifs de fleurs. Une présence dans mon dos m'arracha à ce moment de paix, me poussant à lorgner par-dessus mon épaule pour découvrir ma tante.
— Qu'est-ce qu'il se passe ? questionnai-je d'un ton tranquille.
La plus âgée vint prendre place sur un siège près de moi, croisant mes longues jambes avant de planter un regard sérieux sur ma personne.
— Tu sais que je t'ai toujours soutenu, pas vrai ?
— Bien sûr et je t'en suis infiniment reconnaissant, mais...
— Tu es notre roi depuis un millénaire maintenant, il serait tant que tu te maries, Aolis. Ta sœur aussi d'ailleurs, c'est votre devoir de donner une descendance à notre peuple, surtout toi, déclara-t-elle d'un ton solennel.
J'aurais dû m'en douter, cela faisait actuellement un demi-siècle que Haera me tenait la jambe dans le but de le voir enfin céder au mariage. J'avais tenu bon jusque-là et comptais encore continuer pendant un petit moment.
— Je t'en prie, nous sommes en période de paix, je ne vais pas mourir demain et laisser le trône sans héritier. Et j'ai bien l'intention de régner longtemps, avec ou sans progénitures.
— Là n'est pas la question ! Cesse donc de faire l'enfant, ça ne concerne pas uniquement ta personne, Aolis ! rétorqua-t-elle, sévère. Combien de temps encore comptes-tu faire attendre Merethyl ?! Et notre peuple ?! Le rôle d'un roi est de diriger, mais tu as aussi des obligations envers les tiens autres que celle d'assurer un bon gouvernement, que cela ne t'en déplaise !
Il me fallut un effort colossal pour ne pas lever les yeux au ciel à l'instant où ma fiancée fut mentionnée. La simple énonciation de son prénom suffisait à me provoquer un sentiment d'ennui viscéral. C'était, probablement, l'élément que me dérangeait le plus dans cette tirade devenue bien trop familière. Alors que j'ouvris la bouche pour poursuivre cette conversation agaçante, une nouvelle présence attira mon attention.
— Oh ! Pardon, ai-je interrompu une discussion important ?
— Non, ne t'inquiète pas, Arel.
Un soupir discret glissa entre les lèvres de la dame quand elle comprit qu'elle n'aurait pas le dernier mot ici. Elle se redressa et m'adressa un regard qui en dit long sur ce qu'elle pensait de mon attitude, mais je fis mine de n'avoir rien vu. Le soldat inclina respectueusement la tête lorsque la sœur du précédent souverain passa près de lui, puis il vint combler la place qu'elle avait laissée vacante. Il déposa deux bouteilles de vin sur la table ainsi que des verres qu'il remplit.
— Tu l'as fait exprès, n'est-ce pas ?
— Un peu, déclara l'elfe aux cheveux de feu, je sais à quel point ce sujet est assommant pour toi. Même si je ne peux pas lui donner complètement tort.
— Oh pitié, pas toi aussi...
— Allons, Aolis, n'as-tu pas envie de fonder une famille ? Et Merethyl est une jeune femme absolument merveilleuse, en plus d'avoir tout ce qu'il faut pour faire une bonne reine, c'est l'épouse rêvée pour toi.
À la suite de ce discours élogieux de la concernée, je me retournai un peu dans mon siège pour observer la brune qui conversait avec ma cadette dans le canapé. Il était vrai qu'elle avait tout pour plaire, elle était belle, sociable, intelligente et son sourire qui faisait naître d'adorables fossettes sur mes joues pouvait voler le cœur de bien des hommes. Mais tout ça ne fonctionnait pas avec moi, je n'arrivais décidément pas à la trouver autre chose que fade.
— Peut-être bien, mais elle est justement beaucoup trop parfaite, lâchai-je en retrouvant sa position initiale.
— Comment ça ? Je ne vois pas en quoi cela est un défaut, mon ami...
— Elle manque de caractère, cette fille a été élevée dans cet unique but. Elle n'a rien d'autre dans la vie, toutes ses actions ne sont guidées que par l'objectif qu'on lui a imposé, sans ça, elle n'a rien. Cela fait que même la moindre de ses respirations est calculée, son charisme n'est qu'une illusion et je déteste ça chez elle.
Arel resta silencieux face à mes paroles, il ne savait quoi répondre à cela. J'avais bien conscience que mes mots envers ma promise pouvaient paraitre cruels, mais avec mon ami, je pouvais être honnête sur mes sentiments et c'était toujours ce que j'avais fait. Je songeai, un instant, à lui parler de ce drôle de sentiment qui se saisissait de moi quand je pensais à cette esclave à longues dents. Mais je me ravisai, parce que, justement, c'était d'une vampire qu'on parlait et ma haine de ces êtres était connue de tous. Par conséquent, être troublé par l'une d'entre eux, c'était tout bonnement impossible à avouer. Je m'emparai de mon verre de vin en me laissant glisser dans mon siège pendant que je m'abreuvais du liquide alcoolisé. Je terminai cul sec avant de reposer le récipient vide sur la table.
— Alors pourquoi ne romps-tu pas tes fiançailles ? poursuivit mon camarade en remplissant à nouveau mon pichet.
— Sous quel motif ? Si j'avais trouvé quelqu'un d'autre pour me marier, j'aurais pu faire cela, mais pas ici. Et ne pas l'aimer n'est pas une excuse viable. On ne me demande pas de l'aimer, seulement de l'épouser pour pouvoir engendrer une descendance.
— Et il n'y a vraiment personne qui t'intéresse ?
Je secouai négativement la tête quand la vision de deux yeux rouges me vint à l'esprit. Cela provoqua un froncement de sourcils accompagné d'un faible grognement qui tira un haussement de l'arcade curieux à l'elfe assis à mes côtés. Je fis taire sa question silencieuse d'un mouvement de main las. Il était urgent que je n'aie plus cette esclave à ma portée, elle m'empêchait réellement de me concentrer sur l'essentiel.
— Arrêtons de parler de cela, soufflai-je, profitons simplement de la soirée.
Compréhensif, Arel n'insista pas et hocha positivement la tête à sa suggestion, ce qui m'arracha un sourire amical.
***
À mon combientième verre étais-je ? J'observai les bouteilles vides, apportées à leur demande par cette petite vampire, sur la table et mon ami qui arboraient un rictus idiot à côté de moi. Nous avions mangé dehors en enchaînant les sujets de conversation et surtout les verres. Les elfes étaient dotés d'une constitution plus solide que celle des hommes et toléraient donc mieux l'alcool, cela ne voulait pas dire pour autant que nous ne pouvions être touchés par les effets des spiritueux. Je passai une main sur mon visage pour tenter de recouvrer mes esprits, même si cela s'avéra particulièrement compliqué. Je n'aurais pas dû boire autant, j'avais juste suivi mon compagnon.
Je basculai la tête vers l'arrière et mes yeux se plantèrent sur les diamants qui paraient la robe nocturne du ciel. C'était quelque chose que je voyais depuis le début de mon existence et, pourtant, je ne m'en lassais jamais. Les étoiles offraient un spectacle paisible et magnifique en même temps, autorisant un arrêt dans le temps pour un moment.
— Aolis, appela la voix de ma tante avec douceur, tu devrais aller te reposer. Vous avez fait un long voyage.
— Hum, oui, mais rends-moi un service avant, ma tante.
— Que veux-tu ?
— Fais quérir la sang pur.
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